ÉLECTIONS MUNICIPALES: «Le fugitif, les envahisseurs et labstention»
Lesoir; le Jeudi 29 Novembre 2012Par Cherif Ali*
Quel curieux titre, n'est-ce pas, amis lecteurs ? Demblée, on se pose
la question de savoir quel type de rapport il puisse exister entre le
fugitif, les envahisseurs et labstention. Je tâcherai de m'en
expliquer, mais pour ce faire, j'en appelle déjà à la mémoire de tout un
chacun, pour lui demander de se «transporter» dans les années 1970. A
cette époque, souvenez-vous, l'unique chaîne de télévision algérienne
diffusait une série très suivie, intitulée Le fugitif et dont David
Vincent était le héros principal. Celui-ci, victime d'un complot ourdi
par des extra-terrestres, devait constamment changer de résidence pour
les fuir, d'autant plus qu'il était pratiquement le seul à pouvoir les
démasquer et à contrecarrer leur projet de colonisation de la Terre. Et
la particularité de ces envahisseurs, ou le détail qui permettait de les
reconnaître, se situait dans «leur index coupé». Voilà donc
lexplication que je devais aux lecteurs concernant le fugitif et les
envahisseurs. Quant à la deuxième explication relative à labstention
qui, selon la presse nationale, plane sur les élections à venir, qui
embarrasse les partis politiques, dans le sens où contrairement aux
législatives, beaucoup d'entre eux peinent à susciter lengouement des
électeurs, du fait de lindigence du discours électoral présenté et de
la qualité des candidatures soumises au choix populaire. Labstention
inévitable de mon point de vue, risque dêtre exacerbée davantage par un
élément anodin de prime abord, mais qui doit être pris au sérieux dans
ce quil peut induire comme désordre dans les rangs des électeurs. Il
sagit de lencre indélébile, cette substance liquide, noire ou colorée,
utilisée lors des législatives passées et dans laquelle nous avons tous,
électeurs que nous étions, trempé «goulûment» notre index gauche. Et
indélébile, elle létait vraiment puisquelle a résisté aux frottements,
à leau de Javel et même aux produits dissolvants les plus performants ;
impossible de la détacher ou de la faire partir le lendemain du scrutin
des dernières législatives, encore moins les jours qui suivirent. Bien
après les élections, elle létait encore là, présente, tenace, ancrée,
incrustée, pugnace sur tous les index
nous faisant ressembler, par
certains aspects, aux envahisseurs sus-décrits. La comparaison sarrête
là bien sûr, parce quil nest pas question pour moi de comparer les
honorables électeurs aux Martiens mais, avouezle amis lecteurs, la
tentation était plus forte. Voilà donc pour lexplication concernant la
métaphore utilisée dans le titre de cette contribution. Sinon, hormis
les militants de partis qui avaient, lors des élections législatives,
«motif à arborer leur doigt» en signe de ralliement et dengagement,
pour les «primo votants», ceux de la gent féminine notamment, le souci
était réel dans le sens où, au-delà de lesthétique ou du simple
caprice, la gêne était manifeste et lencre tellement ostentatoire.
Certaines dentres elles ont été réduites, en dernier ressort, à masquer
leur doigt de sparadrap, compte tenu de la gêne physique occasionnée
mais aussi pour échapper aux quolibets des quidams dans la rue qui ne
voulaient pas rater cette occasion pour mettre leur grain de sel. Ceci a
contraint certaines dentre elles à réfléchir sérieusement sur
lattitude à adopter aux prochaines élections. Beaucoup délecteurs
aussi, au sens civique pourtant élevé, ont affirmé dailleurs, quon ne
les y reprendrait pas et quils seraient forcés, par devers eux et
quelque part à leur corps défendant, «daller à la pêche» le 29 novembre
prochain, c'est-à-dire : sabstenir ! Ne sagit-il pas là, au-delà de la
cocasserie de la situation, dun problème méritant dêtre pris en charge
par lautorité publique ? Alors, et en attendant de «redécouvrir» le
vote électronique, ne vaut-il pas mieux revenir à lémargement sur la
liste électorale au lieu denduire lindex de lélecteur de toute encre,
fût-elle sympathique ? Et ainsi faire économiser aux collectivités
locales et à lEtat toutes dépenses superflues (encre, encriers,
chiffons) si on part du principe quil ny a pas de petites économies.
Lautre avantage découlant de cette proposition est à rechercher en
terme de «déroulé» de lopération de vote elle-même, puisque on optant
pour la simple signature de lélecteur au lieu de son empreinte, on
obtiendrait un gain de temps facilitant la tâche des encadreurs des
bureaux de vote dune part et, dautre part, profitable à lélecteur
lui-même qui peut ainsi se libérer de son devoir électoral avec un
minimum de contraintes, tout en préservant «son intégrité physique».
Ceci est largement faisable dautant plus que ni lencre indélébile,
tout comme dailleurs la présence dobservateurs étrangers, ne font
partie du corpus électoral de notre pays. Et puis, entre nous, la pose
de lempreinte estelle un gage fiable et suffisant à 100% ? En
conclusion, si cette proposition venait à être prise en compte, cela
voudrait dire que labstention ne serait pas uniquement dorigine
politique, mais pourrait découler dun fait exceptionnel comme celui que
je viens de décrire supra. Si cette théorie est recevable, jen
revendique, modestement, la paternité. Néanmoins, si lon persiste
maintenant à menduire lindex gauche avec cette fameuse encre, je
naurais dautre ressource que de lever lindex droit, préventivement,
pour pronostiquer une participation, non pas de 52,53 ou 55% comme
Belkhadem ou 40 à 45% comme Daho, mais une abstention majorée de 3 à 5
points au moins, de ce qui est pressenti pour le scrutin à venir. A bon
entendeur...
(*) Cadre supérieur à la retraite
Categorie(s): voxpopuli
Auteur(s): lesoir